Les cloches de la cathédrale Ste Thérèse à Sokodé ont carillonné le vendredi 15 mars 2024 dans la matinée pour annoncer le décès d’un témoin de la foi en la personne de Mgr Ambroise K. DJOLIBA dans sa 86èmeannée dont 58 ans de ministère sacerdotal et 31 ans de ministère épiscopal. Quel a été son parcours ? Que laisse-t-il à l’Eglise et au monde ?
Né en 1938 à Siou (Préfecture de Doufelgou), Ambroise a reçu le baptême et la première communion le 23 avril 1948 à Siou, la confirmation le 09 mai 1948. De 1947 à 1952, il fit ses études primaires à l’école catholique de Siou, et de 1952 à1960, ses études secondaires au petit séminaire Ste Jeanne d’Arc de Ouidah au Dahomey (Actuel Bénin). De 1960 à 1966, il poursuit sa formation philosophique et théologique au Grand Séminaire St Gall de Ouidah. De retour au bercail, il est ordonné prêtre le 11 avril 1966. Il exerça de nombreuses charges pastorales avant sa nomination comme évêque de Sokodé le 17 avril 1993. Ordonné évêque le 7 août 1993, il a exercé sa charge pastorale jusqu’à la nomination de son successeur le 3 janvier 2016. De 2016 jusqu’à son rappel à Dieu le 15 mars 2024, il jouissait d’un temps de repos à la Maison St Jean-Marie Vianney à Sokodé. A l’annonce de son rappel à Dieu, de nombreuses voix se sont élevées pour saluer l’homme et le pasteur qu’il a été. En tant qu’évêque de Sokodé, Mgr Ambroise a travaillé à renforcer l’équipe des agents pastoraux par l’envoi des jeunes gens dans les maisons de formation des futurs prêtres. Ainsi a-t-il ordonné une quarantaine de prêtres pour le compte du diocèse de Sokodé. En raison de l’étendue du champ à moissonner, il n’hésita pas à faire appel à des communautés religieuses afin de l’aider dans sa mission de pasteur de l’Eglise de Sokodé. C’est à bon droit que le Père Aristide K. KATALIKO, prêtre assomptionniste ayant servi à Sokodé salue la mémoire de ce serviteur de Dieu qui a œuvré pour l’accueil des Assomptionnistes dans le diocèse de Sokodé le 21 septembre 2006. A l’instar de cette communauté missionnaire, Mgr Ambroise a su collaborer avec plusieurs autres communautés religieuses afin de combler le manque d’agents pastoraux créé par la scission du diocèse de Kara en juillet 1994. Ainsi a-t-il œuvré pour l’arrivée et l’installation des communautés religieuses telles que les Sœurs de Ste Catherine le 11 novembre 1996, les Filles de Marie Immaculée-Marianistes en 1997, les Orantes de l’Assomption en septembre 1997, les Sœurs Notre Dame de Nazareth en 2001, le communauté du Puits de Jacob le 4 janvier 2002, et enfin les Augustins de l’Assomption. Une religieuse en mission en Côte d’Ivoire rend hommage à ce « prélat exceptionnel, très sympathique, serein, et compatissant. »
Mgr DJOLIBA a été un témoin de la foi par son engagement à faire connaitre le Christ par la création de nouvelles communautés paroissiales. Ascension du Seigneur de Tindjassé et St Albert le Grand de Tchébébé en Janvier 1996, Notre Dame de Lourdes de Lama Tessi en janvier 2004, Notre Dame de la Paix en janvier 2006, Notre Dame de l’Assomption de Komah le 12 octobre 2007, Nativité du Seigneur de Kpandiyo le 31 mars 2008, Notre-Dame de Lorette de Goubi le 7 octobre 2012 et enfin Immaculée Conception d’Aléhéridè le 20 décembre 2013.
Son témoignage de foi l’a poussé également à réserver une place de choix au secteur éducatif dans sa pastorale. En effet, grâce à son leadership, des écoles, des collèges et des lycées ont été créés à travers le territoire diocésain. Outre le secteur de l’éducation, Mgr DJOLIBA a répondu aux appels des populations par la mise sur pied des infrastructures sanitaires.
Aussi a-t-il fondé une radio confessionnelle avec l’aide du diocèse d’Opole en Pologne témoignant ainsi de son désir d’apporter la Bonne Nouvelle aux chrétiens pour l’approfondissement de leur foi dans leur maison, et même aux non-chrétiens. Mgr Ambroise fut un pasteur de grand courage qui n’avait pas peur de dire la vérité quand il faut. N’est-ce pas là une des missions d’un pasteur ? Plusieurs témoignages concordent aussi pour saluer en lui le “bon africain”. Car il était profondément ancré dans les valeurs positives de l’Afrique. Cela se vérifiait dans ses prêches. En tout cas, il savait scruter les Saintes Ecritures pour en extraire la ‘moelle’ indispensable à la vie spirituelle de ses brebis.
Mgr DJOLIBA s’est fait selon le mot de l’Apôtre St Paul “Tout à tous” (1Cor 9,22) car il a exercé son ministère épiscopal dans la simplicité mais aussi dans la rigueur envers lui-même. A cet effet, un prêtre salue son sens de la ponctualité : « Mgr Ambroise m’a appris la ponctualité. » Nommé évêque à un moment difficile de l’histoire du monde et du peuple togolais, et se sachant appelé à travailler pour la réconciliation et la paix, il a choisi pour devise épiscopale : « In manus tuas ». N’est-ce pas là un témoignage de foi ?
Mgr Ambroise Kotamba DJOLIBA laisse à l’Eglise et au monde, l’héritage de la foi. En effet, on peut le dire sans risque de se tromper qu’il a mené le beau combat de la foi que l’homme pécheur mène avec la grâce de Dieu. L’évêque émérite de Sokodé peut se réjouir aujourd’hui d’avoir gardé la foi : « J’ai mené le bon combat, j’ai achevé ma course, j’ai gardé la foi. » (2 Tim 4, 7). Après son passage au milieu de nous, on peut aussi dire qu’il a aimé l’Eglise ‘corps du Christ’. Il a servi l’Eglise de Sokodé et l’Eglise du Togo avec foi, amour et dévouement. Car il avait une confiance intrépide dans le Christ qui l’a configuré à lui dans le sacerdoce ministériel et de surcroît lui a confié la charge épiscopale donc celle de successeur des apôtres. En face d’un géant de la foi comme Mgr Ambroise K. DJOLIBA, on ne saurait tout dire. Plaise au Seigneur d’accueillir maintenant auprès de lui celui qui s’est efforcé à sa manière d’être témoin de son Fils Jésus-Christ. Merci de nous l’avoir donné. Que ses œuvres l’accompagnent ! Puisse-t-il s’entendre dire : « Serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton maître. » (Mt 25, 21) Que son exemple nous stimule. Requiescat in pace !
2 réponses sur « Mgr Ambroise K. DJOLIBA : Un témoin de la foi s’en est allé »
Mgr Djoliba est un bon père que j’ai aimé. Sa rigueur envers les agents pastoraux et voir même des laïcs que nous sommes, fait de nous des bons chrétiens . .
Qu’il entre dans la gloire du maître des vocations.
Père Bertrand LEPESANT s.j.
Communauté du Puits de Jacob Togo
300 BP 55 Sokodé TOGO
email : cpuitsdejacob@gmail.com
site http://www.puitsdejacob.org
Tél : +228 90 31 80 73
Témoignage sur Monseigneur Ambroise Djoliba
Un dimanche de juillet 1995 ; un ecclésiastique vient dans la maison de la Communauté du Puits de Jacob, la Thumenau à Plobsheim en Alsace. C’est une de nos sœurs âgées luthérienne qui fait partie de l’institut séculier « les servantes de l’unité », rattaché à Taizé, qui l’accueille dans le parc.
Quand j’arrive, il se présente comme l’évêque de Sokodé au Togo. Le Togo je connaissais car un des premiers communautaires du Puits de Jacob était Togolais étudiant en médecine à Strasbourg en 1974. J’étais venu en 1988 lui rendre visite après son retour dans son pays pensant que nous pourrions faire quelque chose pour l’église au Togo, mais ce n’était pas l’heure.
C’est 7 ans après que l’évêque de Sokodé est venu nous dire son besoin d’une communauté nouvelle pour la pastorale du Renouveau charismatique qui commençait à se développer sur son diocèse. Une religieuse française, amie de Monseigneur Ambroise, l’avait encouragé à s’adresser à nous.
J’ai été bouleversé par la simplicité de cet homme et son humilité. Il était comme Jésus au bord du Puits de Jacob qui demande à la samaritaine : « donne-moi à boire » (Jn4,7).
Ainsi a commencé notre relation et notre amitié avec Monseigneur Ambroise.
Dès le mois de décembre 1995 je suis venu à Sokodé pour le rencontrer dans son milieu pour voir ce que nous pourrions apporter au diocèse. J’ai tout de suite senti un homme de Dieu, à l’écoute de l’Esprit Saint, infiniment respectueux de qui nous sommes et désireux que ce courant du Renouveau charismatique soit accompagné avec discernement et reçoive une formation. Il a invité ses prêtres à venir me rencontrer.
L’année suivante, je suis revenu en août avec 4 autres membres de la Communauté pour donner une session de formation aux responsables du Renouveau de tout le Togo. Une centaine de personnes était présente.
Et chaque année je suis revenu avec nos différents responsables pour préparer notre réponse à son appel. C’est lors d’une de ces visites qu’est née en nous l’inspiration de créer un centre médical chrétien qui aborderait la personne malade dans toutes ses dimensions, physique, psychologique et spirituelle. Nous avons pris le temps de discerner qui partirait et quand. C’est le 4 janvier 2002 qu’une petite équipe de 4 que je dirigeais, est arrivée à l’aéroport de Lomé.
Nos recherches pour trouver un logement n’ayant pas abouti, Monseigneur nous a proposé un terrain qu’il avait acquis en pensant à nous, et nous a proposé de nous accueillir dans sa résidence.
Nous avons alors commencé à construire notre « case » tout en vivant la vie quotidienne avec Monseigneur Ambroise. Pendant 1 an et demi, nous avons ainsi bénéficié de son hospitalité. Un temps de grâces pour nous laisser transformer par la culture, par l’église du Togo par le sens pastoral que nous le voyions vivre, par la rencontre des personnes qu’il recevait chez lui, personnes simples, comme cette commerçante qu’il avait rencontrée au marché d’Atakpamé, ou évêques du Togo ou des pays limitrophes ou bienfaiteurs venus d’Alsace…
Monseigneur Ambroise est parti alors qu’il était hospitalisé dans le Centre médical du Puits de jacob. Les derniers mots qu’il a dits c’est « donne-moi à boire », ces mots que Jésus a dits à la Samaritaine et qui ont conduit celle-ci à la rencontre face à face, « Je le suis moi qui te parle » Jn 4, 26. Et à devenir évangélisatrice auprès des gens de son village.
Cher Ambroise aujourd’hui, Jésus, celui que tu as servi pendant toute ta vie, je crois qu’il te dit un peu la même chose. « Je suis celui qui t’a aimé, celui que tu as cherché, celui que tu as aimé, celui que tu as annoncé, entre dans la joie de mon intimité. »
Père Bertrand LEPESANT s.j.
Fondateur de la Communauté du Puits de Jacob